Le mot du Parrain
Voilà vingt ans, je publiais mon premier roman. Quelques mois plus tard, j’étais invité à Fuveau. J’y suis allé, la boule au ventre. Déjà, je savais que le proverbe qui va suivre possède son fondement de vérité : Nul n’est prophète en son pays. Aixois, j’allais présenter mon roman à Fuveau ! Au pied de Sainte-Victoire !
Certes, je n’en menais pas large. Tant d’écrivains, femmes et hommes, qui s’embrassaient, se reconnaissaient, s’échangeaient des nouvelles du milieu littéraire ! Et moi, pauvre de moi, seul derrière l’unique pile de mon unique livre.
Le samedi midi, j’ai pris part au repas de Grand Bastide. Je parlais peu, car je ne connaissais personne. Avant la fin de ce banquet, j’ai pris la poudre d’escampette. Avec Gilles Del Pappas, lui aussi jeune littérateur. Nous avions décidé de rentrer à pied. Pour ne pas gêner, pour n’encombrer personne. Et nous sommes donc partis, en voleurs, sous un soleil crissant de cigales, les semelles accrochant le goudron qui se mettait à fondre dans la canicule. Nous étions des chanceux. Nous participions aux Ecrivains en Provence !
Une demi-heure plus tard, nous transpirions à grosses gouttes. Le chemin était long. Il n’en finissait plus. Dans la fournaise, une voiture s’est fort heureusement arrêtée à notre hauteur. C’était Jean Bonfillon. Il nous a pris en charge, le sourire en coin. Ce simple réflexe de gentillesse, d’empathie, de générosité a fait de moi un inconditionnel du salon de Fuveau. Je n’ai, depuis, manqué aucune édition.
En tant que parrain, j’aurai une pensée particulière pour les lectrices et lecteurs, bien entendu. Mais aussi pour tous les bénévoles. Sans vous, sans votre amour pour la littérature, ce salon ne serait pas. Je me permets donc, toutes et tous, de vous embrasser. Sans oublier Jean. Ni Philippe.Jean-Paul DELFINO
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